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SANTE-AFRIQUE : Le Conseil de securite se penche sur le SIDA

Par Jim Wurst

NATIONS UNIES, 12 janv. (IPS) - L'epidemie du SIDA exerce une enorme pression sur les services de sante en Afrique, elle decime la main-d'oeuvre et fait des millions d'orphelins. Le Secretaire general des Nations Unies, Kofi Annan, l'a decrite comme un ''cocktail de catastrophes'' lors de la toute premiere reunion du Conseil de securite sur un probleme de sante.
Sur l'initiative des Etats-Unis qui assurent la presidence du Conseil ce mois-ci, cet organe des Nations Unies, qui s'occupe normalement du maintien de la paix et du reglement des conflits, vient de passer une journee a examiner l'impact devastateur du VIH/SIDA dans le monde, et plus particulierement en Afrique.
Le vice-president americain, Al Gore, a preside la premiere partie de la reunion. Il a saisi cette occasion pour affirmer : ''Nous devons comprendre qu'il est necessaire d'abandonner la vieille conception de la securite mondiale qui se concentrait seulement sur les armees, les ideologies et la geopolitique''.
''Nous devons montrer que nous pouvons non seulement contenir les agressions, prevenir les guerres et offrir notre mediation dans les conflits, mais aussi travailler ensemble pour faire face a un nouveau siecle et aux nouveaux imperatifs mondiaux'', a declare Gore.
Le vice-president a aussi annonce que l'administration de Clinton se propose d'augmenter de 100 millions de dollars le budget qu'elle consacre a la lutte contre le SIDA surtout en Afrique et en Inde. Ledit budget atteindra desormais 325 millions de dollars.
C'est la premiere fois qu'un vice-president americain a preside une reunion du Conseil de securite.
Le Secretaire general a affirme que ''plus que partout ailleurs au monde, le SIDA represente une grave menace pour la stabilite economique et socio-politique de l'Afrique australe et orientale. L'impact du SIDA dans cette region n'est pas moins destructeur que celui de la guerre''.
''En effet le SIDA est pire que la guerre dans une certaine mesure. L'annee derniere, le SIDA a tue 10 fois plus de personnes que les conflits armes en Afrique'', observe-t-il.
Les statistiques sont incroyables : avec 23,3 millions de porteurs du VIH/SIDA, l'Afrique subsaharienne abrite 69 pour cent des seropositifs du monde. Pres de 13,7 millions sur 16,3 millions de personnes mortes du SIDA sont d'origine africaine. Parmi les 11 millions d'orphelins du SIDA, 90 pour cent sont africains. Pres de 2,2 millions sur 2,6 millions de personnes mortes du SIDA en 1999 sont de la region africaine.
Les ministres de la Sante de la Namibie, de l'Ouganda et du Zimbabwe etaient parmi les premiers a prendre la parole lors de la reunion a laquelle assistaient egalement les patrons de trois agences de developpement.
La ministre namibienne de la Sante, le docteur Libertine Amathila, a declare que ''les ressources disponibles pour prevenir et traiter le VIH/SIDA ne sont pas proportionnelles a l'ampleur du probleme. D'apres les estimations, il faut 2,5 milliards de dollars par an en Afrique pour lutter contre le VIH/SIDA mais seuls 165 millions de dollars sont disponibles''.
Les pays pauvres mettent une grande partie de leurs ressources a contribution. ''Meme en Namibie, ou nous allouons plus de 15 pour cent du PIB aux services de sante, nous n'avons eu aucun impact sur le traitement du VIH/SIDA''.
Mark Malloch Brown, l'administrateur du Programme des Nations Unies pour le Developpement, affirme que ''le capital humain de la region diminue de facon extraordinaire . . . L'incapacite des gouvernements, la mediocrite des services de sante et le declin economique entrainent directement une penurie de vaccin et une chaine de sang contamine. De facon generale, les ecoles, les familles, le monde du travail et les economies sont incapables de relever le defi''.
Le president de la Banque Mondiale, James Wolfensohn, a indique que ''nous pensions pour la plupart que le SIDA est seulement un probleme de sante. Nous avions tort. Le SIDA ne peut plus etre confine au secteur social ou a celui de la sante. Partout en Afrique, le SIDA compromet le processus de developpement''.
Brown a indique qu'au cours des 40 dernieres annees, l'esperance de vie en Afrique a connu un allongement de 24 ans. Si le SIDA suit son actuel rythme, cet acquis sera annihile en l'espace d'une decennie.
Le docteur Peter Piot, le directeur executif de l'ONUSIDA, le programme conjoint des Nations Unies pour la lutte contre le SIDA, est plutot optimiste.
''Nous ne sommes pas du tout impuissants face a cette epidemie'', a confie Piot aux delegues. ''Dans les pays ou il existe une ferme volonte politique, une ouverture d'esprit, et des solutions appropriees a ces problemes, le cours des evenements change et le succes est net''.
Malloch Brown et Piot pensent que l'Ouganda est une nation qui lutte victorieusement contre le SIDA. Piot remarque que le taux d'infection baisse dans tout le pays depuis 1991 et que le nombre de femmes enceintes dans les petites villes diminue de plus de la moitie.
Le ministre ougandais de la Sante, Crisps Kiyonga, a loue les progres effectues par son pays dans le domaine de la sensibilisation publique, de la recherche sur le traitement du SIDA et du changement de comportement. Il a indique que l'Ouganda a presque realise une sensibilisation universelle sur le SIDA.
Par consequent, ''un grand nombre de personnes'' utilisent des preservatifs et pratiquent la monogamie. ''Nous avons reussi a ne plus stigmatiser le VIH/SIDA, dit-il.
''Les porteurs de la maladie se levent eux-memes . . . et conseillent a leurs compatriotes d'eviter les pieges''.
''En derniere analyse . . . seule la decouverte d'un vaccin efficace et bon marche pourra enrayer la progression de cette pandemie'', souligne Kiyonga en recommandant un elan de solidarite internationale.
Alors que la plupart des intervenants insistaient sur l'assistance et la cooperation, Timothy Stamps, le ministre zimbabween de la Sante, a pris une position plus agressive.
Il a compare le budget du SIDA a tout l'argent depense pour faire face au bogue du millenaire, accuse l'industrie occidentale des loisirs de promouvoir la promiscuite, et critique la reaction des pays industrialises vis-a-vis du SIDA en Afrique au cours des 15 dernieres annees.
''La question que nous posons est la suivante : 'Est-ce simplement un manque de comprehension, une nouvelle forme de discrimination raciale ou un autre nettoyage ethnique ?'', s'exclame Stamps.
''Le monde a observe de maniere laconique la croissance exponentielle de l'epidemie du VIH dans les regions qui ne profitent pas materiellement de la croissance de l'economie mondiale'', dit-il.
''Nous sommes supposes accepter que le fait de priver les populations (africaines) des therapies existantes n'est pas une violation des droits de l'Homme. En realite le droit a la sante est l'un des principaux droits universels'', ajoute-t-il.
Stamps a signale que le virus tue presque 1000 personnes par semaine au Zimbabwe et que 15 pour cent des victimes ont moins de cinq ans.
Les intervenants citent de longues listes d'initiatives urgentes, alors qu'aucun d'eux n'a besoin de l'approbation du Conseil de securite pour agir.
Malloch Brown a propose un plan d'action comportant les sept points ci-apres : le soutien des efforts que l'Afrique deploie pour lutter contre la maladie, la promotion de la cooperation bilaterale et de la collecte des fonds, la coordination de l'action de la communaute internationale, l'augmentation des fonds destines a la recherche sur les medicaments anti-SIDA et l'evaluation de l'impact du SIDA sur le contexte general de developpement.
La ministre namibienne de la Sante, Amathila, etait l'un des rares intervenants a etablir un lien entre le SIDA et les problemes traditionnels dont s'occupe le Conseil de securite. Le maintien de ''la securite contribuera considerablement a reduire l'impact du VIH/SIDA en Afrique. En resolvant efficacement les conflits en Afrique, le Conseil de securite aidera sans doute les gouvernements africains a consacrer plus de ressources aux problemes socio-economiques'', pense-t-elle.
Amathila a egalement observe que ''lors des conflits, la violence sexuelle est utilisee comme une arme''. Les enfants soldats ont souvent une vie sexuelle active et sont vulnerables au SIDA. Par consequent, il est necessaire de sensibiliser les soldats de maintien de la paix sur l'implication des comportements a haut risque''.
Amathila a propose un programme de lutte contre l'epidemie en des termes fort simples. Il s'agit du programme ''ABC'' (ou ''ASP'' en francais). ''A'' signifie ''Abstinence'', 'S'' signifie ''Soyez fidele a un seul partenaire'' et ''P'' met l'accent sur l'usage des ''Preservatifs''.

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